La livraison d’armes aux Kurdes d’Irak ne fait pas l’unanimité parmi les croyants allemands

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La livraison d’armes aux Kurdes d’Irak ne fait pas l’unanimité parmi les croyants allemands

9 septembre 2014
Les orthodoxes syriens et les yézidis souhaitent une zone sécurisée par l’ONU. Plusieurs voix se sont élevées parmi les responsables religieux pour s’opposer au projet d’équiper de matériel militaire les troupes combattant les milices de l’Etat islamique.

(Brême/Warburg/Berlin EPD/Protestinter) La livraison d’armes allemandes aux troupes kurdes en Irak suscite des réactions contradictoires parmi les responsables des communautés religieuses. Les représentants de l’Eglise orthodoxe syrienne en Allemagne et le Conseil central des yézidis demandent la création d’une zone protégée par l’ONU en Irak. «La vente d’armes à elle seule ne garantit ni la sécurité des minorités ni la paix en Irak», écrivaient fin août, les deux organisations dans un appel commun.

Les représentants de l’Eglise protestante allemande (EKD) ont, pour leur part, exprimé leur scepticisme. «Nous nous réjouissons de la réaction du gouvernement fédéral allemand, qui ne reste pas inactif face au génocide des yézidis et des chrétiens en Irak», ont déclaré Raid Gharib au nom du Conseil diocésain de l’Eglise orthodoxe syrienne et Telim Tolan du Conseil central des yézidis. Toutefois, le soutien des combattants anti-islamistes du nord de l’Irak doit être lié à des conditions claires. D’autre part, l’équipement fourni aux militaires kurdes pour défendre la plaine de Ninive et les montagnes de Schingal où se trouvent les chrétiens et les yézidis doit être soumis à des garanties de sécurité claires.

Dans quelles mains ces armes vont-elles tomber?

Pour Renke Brahms, chargé de mission pour la paix de l’Eglise protestante allemande (EKD), la livraison d’armes aux troupes kurdes est une erreur. «Personne ne sait ce qu’il va advenir de ces armes dans le futur; dans quelles mains elles vont tomber et si elles ne vont pas causer des situations nouvelles encore plus dangereuses», a-t-il déclaré lors d’une conférence. Pour lui, la principale responsabilité de l’Allemagne est de fournir de l’aide et de l’assistance humanitaire.

Même Sigur Rink, l’évêque militaire protestant, s’est montré critique face au projet de vente d’armes en Irak. «On ne peut pas laisser champ-libre à la livraison de chars et de missiles», a-t-il déclaré dans l’émission «Horizonte» de la télévision locale de la Hesse. «L’urgence est de protéger les membres des minorités religieuses qui fuient la milice terroriste de l’Etat islamique et de leur fournir des biens de première nécessité. La mise à disposition d’armes ne doit intervenir qu’en dernier recours et doit être considéré comme une mesure d’urgence absolue» a estimé Sigur Rink.

L’inaction n’est en aucun cas une solution

L’ancien évêque de Berlin Wolfgang Huber a mis en garde contre la passivité face au conflit irakien. «Le commandement “tu ne tueras point”, signifie également “tu ne laisseras pas tuer”», a déclaré l’ancien membre du Conseil de l’EKD. Le génocide qui se déroule en Irak est «le pire crime qui soit». On peut avoir des opinions divergentes sur les mesures à prendre pour mettre fin au bain de sang causé par la milice de l’Etat islamique. Mais l’inaction n’est en aucun cas une solution.

Ferdinand Kirchhof, vice-président de la Cour constitutionnelle fédérale n’exclut pas que cette Cour soit appelée à se prononcer sur la vente d’armes aux Kurdes d’Irak du Nord. Le Bundestag doit-il accepter cette vente? Interrogé par le «Welt am Sonntag», Ferdinand Kirchhof a répondu que «c’est effectivement une question intéressante que je pourrais être amené à instruire en deuxième instance, avec mes collègues. Pour cette raison, je m’abstiendrai de tout commentaire personnel.»

Le 31 août, le gouvernement fédéral allemand a communiqué son projet de livraison d’armes. Le lendemain, une séance extraordinaire du Bundestag était convoquée sur ce thème. Le SPD et l’Union CDU/CSU s’étaient mis d’accord sur une résolution commune soutenant ce projet. Ils ont été suivis par la majorité lors de ce vote qui n’avait qu’un caractère indicatif.