Engouement pour le pèlerinage de Saint-Jacques de Compostelle: Croyants et marcheurs à la recherche d'un chemin intérieur
10 avril 2001
Depuis le début des années 90, le nombre de pèlerins qui se rend à pied à Saint-Jacques de Compostelle a connu une augmentation fulgurante
Durant l’année sainte de 1999, près de 130'000 personnes ont marché sur la cité galicienne.Ce pèlerinage n’avait plus connu un tel engouement depuis le Moyen-Âge. Des pèlerins d’un genre nouveau sont venus grossir les rangs des croyants qui prennent la route. Côte à côte cheminent en effet des passionnés de randonnée, des férus d’histoire et des quêteurs de sens. «Depuis quelques années, il y a une augmentation sensible du nombre de gens qui prennent la route. On sent un regain d’intérêt pour le pèlerinage en général», constate Adrien Grand, président de l’Association helvétique des Amis du chemin de Saint-Jacques. « Et les gens qui partent n’ont pas tous des motivations religieuses.»
Jacques Reymond, 65 ans, protestant, est de ceux-là. En 1994, il parcourt les 400 kilomètres qui séparent Leòn de Saint-Jacques en compagnie d’amis catholiques. «Nous ne sommes pas partis dans le même état d’esprit, précise-t-il. Pour moi, ce pèlerinage n’avait rien d’une quête spirituelle. La légende de Saint-Jacques ne m’émeut pas particulièrement et l’idée de me rendre en un lieu que l’on dit saint pour obtenir le pardon de Dieu est en parfaite opposition avec mes convictions protestantes. En faisant cette étape du pèlerinage, mon but était avant tout de faire de la marche». Une manière de se retrouver face à soi-même, malgré la présence des compagnons de route: «Le silence arrive, on ne le commande pas. On vit des moments de profonde introspection, on pense à des problèmes de vie», conclut-il.
§Introspection et renouveau spirituelPour de nombreux pèlerins, la progression géographique fait écho à un cheminement intérieur, qui permet de faire un retour sur soi-même. «Beaucoup de gens tiennent à faire le parcours seuls, explique Jacques Reymond, l’une de mes connaissances a décidé de partir alors qu’elle avait de sérieux problèmes familiaux. Elle voulait prendre du recul par rapport à sa situation afin d’y voir plus clair».
Ancien directeur de l’Office protestant de la communication audiovisuelle du canton de Vaud, Guy Perrot est aussi un grand amateur de randonnée. Selon lui, l’engouement pour le pèlerinage correspond avant tout à une nouvelle manière de vivre la spiritualité: «Si les pèlerinages et les retraites dans les couvents connaissent un succès grandissant, c’est que les gens ont besoin de s’extraire du quotidien et de réfléchir sur eux-mêmes pour vivre leur spiritualité. Ils ne vont plus forcément dans un lieu de culte près de chez eux», constate-t-il.
§Chemin chargé d’histoireSur la route, Jacques Reymond a été très ému par les tombes séculaires des pèlerins morts en chemin: «J’ai beaucoup pensé à ceux qui ont fait cet itinéraire au Moyen-Âge dans le but de se réconcilier avec Dieu. Cela ne correspond pas à mes convictions religieuses, mais je trouve que cela revêt une signification très forte».
La dimension historique du chemin est fortement ressentie par de nombreux pèlerins. C’est même l’une des raisons qui ont poussé Marion Bélisle, une Chaux-de-fonnière de 25 ans, à prendre la route à la fin de ses études secondaires. «Je rêvais de faire ce pèlerinage depuis mon enfance, mais mes motivations n’étaient absolument pas religieuses. Je voulais mettre mes pas dans ceux des pèlerins qui avaient parcouru cette route au fil des siècles et sentir le lien se tisser à travers les âges», se souvient-elle.
§Rite de passageLe pèlerinage de Marion Bélisle a constitué pour elle une sorte de voyage initiatique: «Cette expérience a marqué mon passage à la vie adulte. J’ai mûri pendant ces trois mois de marche. Après mon retour, j’ai quitté la maison de mes parents et j’ai commencé à travailler.»
De tout temps, le pèlerinage a été perçu comme un temps à part qui aboutit à une transformation de celui qui prend la route. Au XVe siècle, le pénitent partait dans l’espoir de retrouver le droit chemin et de revenir lavé de ses péchés. «On dit toujours que l’on est différent lorsque l’on revient d’un pèlerinage», relève Marion Bélisle, «En ce qui me concerne, j’ai surtout eu l’impression d’avoir franchi un pas dans mon parcours de vie.»
Pour la plupart des pèlerins nouveaux, ce n’est plus le tombeau de Saint-Jacques qui constitue l’intérêt du pèlerinage, mais la route qui y mène. Une route balisée et universelle, adaptée aux semelles de ceux qui marchent pour le sport, pour mieux se connaître, ou pour se rapprocher de Dieu. Comme le dit Adrien Grand, quand on se rend à Compostelle «on ne marche pas sur n’importe quel chemin».
Jacques Reymond, 65 ans, protestant, est de ceux-là. En 1994, il parcourt les 400 kilomètres qui séparent Leòn de Saint-Jacques en compagnie d’amis catholiques. «Nous ne sommes pas partis dans le même état d’esprit, précise-t-il. Pour moi, ce pèlerinage n’avait rien d’une quête spirituelle. La légende de Saint-Jacques ne m’émeut pas particulièrement et l’idée de me rendre en un lieu que l’on dit saint pour obtenir le pardon de Dieu est en parfaite opposition avec mes convictions protestantes. En faisant cette étape du pèlerinage, mon but était avant tout de faire de la marche». Une manière de se retrouver face à soi-même, malgré la présence des compagnons de route: «Le silence arrive, on ne le commande pas. On vit des moments de profonde introspection, on pense à des problèmes de vie», conclut-il.
§Introspection et renouveau spirituelPour de nombreux pèlerins, la progression géographique fait écho à un cheminement intérieur, qui permet de faire un retour sur soi-même. «Beaucoup de gens tiennent à faire le parcours seuls, explique Jacques Reymond, l’une de mes connaissances a décidé de partir alors qu’elle avait de sérieux problèmes familiaux. Elle voulait prendre du recul par rapport à sa situation afin d’y voir plus clair».
Ancien directeur de l’Office protestant de la communication audiovisuelle du canton de Vaud, Guy Perrot est aussi un grand amateur de randonnée. Selon lui, l’engouement pour le pèlerinage correspond avant tout à une nouvelle manière de vivre la spiritualité: «Si les pèlerinages et les retraites dans les couvents connaissent un succès grandissant, c’est que les gens ont besoin de s’extraire du quotidien et de réfléchir sur eux-mêmes pour vivre leur spiritualité. Ils ne vont plus forcément dans un lieu de culte près de chez eux», constate-t-il.
§Chemin chargé d’histoireSur la route, Jacques Reymond a été très ému par les tombes séculaires des pèlerins morts en chemin: «J’ai beaucoup pensé à ceux qui ont fait cet itinéraire au Moyen-Âge dans le but de se réconcilier avec Dieu. Cela ne correspond pas à mes convictions religieuses, mais je trouve que cela revêt une signification très forte».
La dimension historique du chemin est fortement ressentie par de nombreux pèlerins. C’est même l’une des raisons qui ont poussé Marion Bélisle, une Chaux-de-fonnière de 25 ans, à prendre la route à la fin de ses études secondaires. «Je rêvais de faire ce pèlerinage depuis mon enfance, mais mes motivations n’étaient absolument pas religieuses. Je voulais mettre mes pas dans ceux des pèlerins qui avaient parcouru cette route au fil des siècles et sentir le lien se tisser à travers les âges», se souvient-elle.
§Rite de passageLe pèlerinage de Marion Bélisle a constitué pour elle une sorte de voyage initiatique: «Cette expérience a marqué mon passage à la vie adulte. J’ai mûri pendant ces trois mois de marche. Après mon retour, j’ai quitté la maison de mes parents et j’ai commencé à travailler.»
De tout temps, le pèlerinage a été perçu comme un temps à part qui aboutit à une transformation de celui qui prend la route. Au XVe siècle, le pénitent partait dans l’espoir de retrouver le droit chemin et de revenir lavé de ses péchés. «On dit toujours que l’on est différent lorsque l’on revient d’un pèlerinage», relève Marion Bélisle, «En ce qui me concerne, j’ai surtout eu l’impression d’avoir franchi un pas dans mon parcours de vie.»
Pour la plupart des pèlerins nouveaux, ce n’est plus le tombeau de Saint-Jacques qui constitue l’intérêt du pèlerinage, mais la route qui y mène. Une route balisée et universelle, adaptée aux semelles de ceux qui marchent pour le sport, pour mieux se connaître, ou pour se rapprocher de Dieu. Comme le dit Adrien Grand, quand on se rend à Compostelle «on ne marche pas sur n’importe quel chemin».