Presse romande: les propos d’un faux rabbin font sortir la communauté juive de sa réserve
17 août 2001
Dans un commentaire publié par le quotidien le Temps, un dénommé Christoph Zehntner posait un regard très critique sur l’attitude de l’Etat d’Israël
Mais l’homme, qui n’en est pas à son coup d’essai, est un imposteur : non seulement la communauté libérale de Berne dont il se réclame n’existe pas, mais il usurpe le titre de Docteur de la loi juive. Explications. Autant dire que la supercherie tombe mal. Le 3 août dernier, Le Temps ouvrait ses colonnes aux propos violemment antisionistes d’un dénommé Christoph Zehntner. Sa thèse, celle de voir Israël « renoncer à son rêve colonisateur » pour se transformer en un Etat « démocratique et fédéraliste » qui réunirait sous un même drapeau Juifs et Palestiniens, apparaissait osée. Avec d’autant plus de force que le visionnaire se présentait comme le rabbin de la « Communauté libérale de Berne ». Protestinfo a d’ailleurs signalé ce propos dans une brève.
Oui, mais voilà. De rabbin, notre homme n’en a que la prétention. Et la communauté dont il se réclame n’existe tout simplement pas. « Ce monsieur sait tromper son monde. Ce qui nous fâche, c’est qu’il aurait été aisé de vérifier par exemple qu’un dénommé Christoph ne peut en aucun cas avoir épousé la religion juive, et à fortiori être rabbin. Tout simplement parce que Christoph est un prénom typiquement chrétien. Et si l’on devient juif, on en change », soupire Georges Eisner, vice-président de la communauté juive de la ville Berne. Forte d’environ 300 membres, elle seule se voit reconnue par le gouvernement cantonal, en même temps que celle de Bienne.
Si ses responsables ont réagi, ce n’est en aucun cas en raison du contenu de l’article. « Contrairement à ce qui a été dit, il n’existe aucun conflit entre lui et nous. Nous le considérons comme un usurpateur ou un illuminé et n’entretenons aucun rapport avec lui. Comme tout citoyen, il a le droit d’avoir ses opinions. Cependant, nous refusons que monsieur Zehntner puisse se faire passer pour une autorité de notre communauté. »
§Précédents judiciairesEn 1997, Berne a en effet lancé un appel aux différentes collectivités religieuses en vue d’identifier celles qui feraient partie des partenaires officiels. Christoph Zehntner tente alors de faire inscrire son association. Refus évident, puisque celle-ci regroupe des membres fantômes, et est totalement inconnue. Le bougre insiste, tente l’action judiciaire puis se voit rapidement débouté. Depuis lors, il a écrit quelques lettres de lecteur dans la presse suisse allemande, signant notamment « Chass Wecholile », du nom de sa prétendue communauté fondée en 1997. Celle-ci demeure aux abonnés absents : ni adresse, ni téléphone. Son nom signifie « qu’on en soit préservé ». « Un peu comme si un pasteur se faisait appeler Mahomet-Blocher », ironise un rabbin, authentique celui-ci.
Selon un article du Bund, Christoph Zehntner serait protestant par tradition familiale, puis converti au catholicisme. Il affirme avoir trouvé des ascendances juives dans sa famille. La diaspora juive de Suisse (environ 18'000 personnes), qui à force connaît le nom du malfaisant, n’en croit pas un mot. Suite à plusieurs lettres de réaction, le Temps a publié une «précision». Atteint par téléphone, Christoph Zehntner y persiste et signe : il a été choisi comme rabbin par sa « communauté israélite libérale. » Des propos absurdes. Les communautés israélites « libérales » existent bel et bien. Majoritaires dans le monde, la Suisse n’en compte que deux, à Zurich et à Genève. François Garaï, le rabbin de cette dernière explique : « Par opposition aux Juifs orthodoxes, ce terme désigne des croyants qui considèrent la Loi comme évolutive, ne l’appliquant pas à la lettre. »
Par ailleurs, le titre de rabbin – comme celui de prêtre - correspond à un curriculum défini : « Trois ou quatre ans d’étude du Talmud et de la Thora dans une école rabbinique, puis ordination par un aréopage de pairs. La Suisse ne dispose que de quinze postes de rabbinat », précise Hervé Krief, rabbin de Lausanne. Celui de Berne se nomme Michaël Leipziger. Dans la ville fédérale, Christoph Zehntner occupe officiellement une autre activité : ancien jardinier, il vend désormais du fromage de chèvre au marché.
Oui, mais voilà. De rabbin, notre homme n’en a que la prétention. Et la communauté dont il se réclame n’existe tout simplement pas. « Ce monsieur sait tromper son monde. Ce qui nous fâche, c’est qu’il aurait été aisé de vérifier par exemple qu’un dénommé Christoph ne peut en aucun cas avoir épousé la religion juive, et à fortiori être rabbin. Tout simplement parce que Christoph est un prénom typiquement chrétien. Et si l’on devient juif, on en change », soupire Georges Eisner, vice-président de la communauté juive de la ville Berne. Forte d’environ 300 membres, elle seule se voit reconnue par le gouvernement cantonal, en même temps que celle de Bienne.
Si ses responsables ont réagi, ce n’est en aucun cas en raison du contenu de l’article. « Contrairement à ce qui a été dit, il n’existe aucun conflit entre lui et nous. Nous le considérons comme un usurpateur ou un illuminé et n’entretenons aucun rapport avec lui. Comme tout citoyen, il a le droit d’avoir ses opinions. Cependant, nous refusons que monsieur Zehntner puisse se faire passer pour une autorité de notre communauté. »
§Précédents judiciairesEn 1997, Berne a en effet lancé un appel aux différentes collectivités religieuses en vue d’identifier celles qui feraient partie des partenaires officiels. Christoph Zehntner tente alors de faire inscrire son association. Refus évident, puisque celle-ci regroupe des membres fantômes, et est totalement inconnue. Le bougre insiste, tente l’action judiciaire puis se voit rapidement débouté. Depuis lors, il a écrit quelques lettres de lecteur dans la presse suisse allemande, signant notamment « Chass Wecholile », du nom de sa prétendue communauté fondée en 1997. Celle-ci demeure aux abonnés absents : ni adresse, ni téléphone. Son nom signifie « qu’on en soit préservé ». « Un peu comme si un pasteur se faisait appeler Mahomet-Blocher », ironise un rabbin, authentique celui-ci.
Selon un article du Bund, Christoph Zehntner serait protestant par tradition familiale, puis converti au catholicisme. Il affirme avoir trouvé des ascendances juives dans sa famille. La diaspora juive de Suisse (environ 18'000 personnes), qui à force connaît le nom du malfaisant, n’en croit pas un mot. Suite à plusieurs lettres de réaction, le Temps a publié une «précision». Atteint par téléphone, Christoph Zehntner y persiste et signe : il a été choisi comme rabbin par sa « communauté israélite libérale. » Des propos absurdes. Les communautés israélites « libérales » existent bel et bien. Majoritaires dans le monde, la Suisse n’en compte que deux, à Zurich et à Genève. François Garaï, le rabbin de cette dernière explique : « Par opposition aux Juifs orthodoxes, ce terme désigne des croyants qui considèrent la Loi comme évolutive, ne l’appliquant pas à la lettre. »
Par ailleurs, le titre de rabbin – comme celui de prêtre - correspond à un curriculum défini : « Trois ou quatre ans d’étude du Talmud et de la Thora dans une école rabbinique, puis ordination par un aréopage de pairs. La Suisse ne dispose que de quinze postes de rabbinat », précise Hervé Krief, rabbin de Lausanne. Celui de Berne se nomme Michaël Leipziger. Dans la ville fédérale, Christoph Zehntner occupe officiellement une autre activité : ancien jardinier, il vend désormais du fromage de chèvre au marché.