Colloque d'analyse narrative des récits de la Bible à Lausanne:Une méthode nouvelle pour faire parler les textes
27 février 2002
Du 7 au 9 mars prochains, des chercheurs scientifiques vont se retrouver à l’Université de Lausanne pour un colloque international d’analyse narrative des récits de la Bible
La méthode qu’ils utilisent pour explorer les textes bibliques permet de mettre à jour l’architecture cachée des récits et de retrouver la stratégie que les narrateurs ont choisie pour tenir leurs lecteurs en haleine et transmettre leur message. Le point avec Daniel Marguerat, professeur du Nouveau Testament, pour qui cette méthode originale annonce un renouveau de l’exégèse.Depuis la nuit des temps, les croyants racontent des histoires, mais pas n’importe comment. Longuement façonnés par la transmission orale, puis mis par écrit, les récits bibliques obéissent à de subtiles règles de composition que des chercheurs se sont mis à explorer selon une méthode nouvelle qui leur permet d’analyser la façon dont les narrateurs tirent les ficelles. Car derrière les histoires, apparemment naïves et derrière les silences du texte se cache la fine stratégie du conteur. Pourquoi insiste-t-il sur certains détails qui semblent anodins et fait-il d’autres fois l’économie de précisions dont le lecteur voudrait bien disposer ?
Si le récit s’appesantit sur certains détails, dit Augustin, c’est pour nous avertir de les prendre au sens figuré, comme un symbole ou une allégorie. Il s’agit donc de repérer dans le texte les signaux qui balisent et orientent la lecture.
§La fonction du détail L’analyse narrative, qui reformule parfois des concepts très anciens, est apparue ans les années 1960-70. Elle propose des outils pour se demander quelle fonction assument les détails du texte, quelle information ils donnent au lecteur. Cette méthode s’est d’abord appliquée aux textes littéraires romanesques. Son application aux récits bibliques n’intervient que dix ans plus tard, quand la recherche historique commence à s’essouffler et à perdre de sa crédibilité.
Cette lecture renouvelée des textes bibliques fournit à l’exégète un mode d’exploration supplémentaire qui s’ajoute à l’analyse historico-critique et à l’analyse structurale. Rappelons que la visée de la critique historique est de s’intéresser à l’événement historique que rapporte le texte et aux conditions dans lesquelles ce dernier a été écrit, et à la personnalité et à la vie de celui qui écrit. L’analyse structurale, elle, s’intéresse au texte uniquement et au fonctionnement du langage dans le texte.
L’analyse narrative propose pour sa part un déplacement du regard pour chercher à comprendre comment l’auteur communique son message au lecteur ; comment il programme le déchiffrement du sens du texte parle lecteur, comment il le guide dans cette opération.
§Lecteur impliqué « Avec l’analyse narrative, nous cherchons à savoir comment le message du narrateur se tricote avec la vie même du lecteur, comment l’exégète a permis à ses lecteurs de se sentir concerné par le récit », résume Daniel Marguerat, professeur à la Faculté de théologie de Lausanne, spécialiste du Nouveau Testament. Prenons un exemple: la parabole du bon Samaritain est racontée d’un point de vue particulier, celui du blessé au bord du chemin. Le blessé reste anonyme, sans doute pour qu’on puisse mieux s’identifier à lui. Le récit tait ce que le blessé ne sait pas. Autre exemple cité par Daniel Marguerat, pris dans le l’Evangile de Luc (24) : « Le narrateur nous dit au départ que Jésus rejoint les deux disciples qui vont à Emmaüs, ceux-ci ne le reconnaissent pas. L’enjeu du récit est de se demander comment et à quel signe ils vont le reconnaître. Ce signe-là, le pain rompu par le Christ, prend alors une importance capitale. » Grâce à cette nouvelle manière d’explorer les Ecritures, les chercheurs deviennent attentifs à des éléments en général banalisés et négligés par d’autres lectures.
§Des silences éloquentsLes silences et les blancs du récit ont aussi une fonction et un sens aux yeux du conteur.« C’est par ce que le narrateur ne dit pas qu’il suscite l’imaginaire du lecteur » ajoute Daniel Marguerat.
L’analyse narrative s’intéresse par exemple à découvrir comment, sans que soit retouchée notablement l’histoire racontée, trois évangélistes Marc, Matthieu et Jean, parviennent à composer chacun un récit spécifique, simplement par le jeu différencié de leur rhétorique narrative. « On perçoit, écrivent Daniel Marguerat et Yvan Bourquin dans leur manuel d’initiation à l’analyse narrative, « Les récits bibliques », que leur stratégie narrative est au service d’une théologie ; elle pointe chez Marc sur l’isolement progressif de Jésus, chez Matthieu sur la relation paradigmatique maître-disciples, tandis que Jean s’attache à mettre en scène l’Enigme de l’Envoyé de Dieu. »
Cette approche nouvelle est en plein développement. Les participants au Colloque international qui va avoir lieu début mars à l’Université de Lausanne confronteront leurs résultats au travers de septante exposés et présenteront des aspects de leur travail lors de quatre conférences publiques.
Si le récit s’appesantit sur certains détails, dit Augustin, c’est pour nous avertir de les prendre au sens figuré, comme un symbole ou une allégorie. Il s’agit donc de repérer dans le texte les signaux qui balisent et orientent la lecture.
§La fonction du détail L’analyse narrative, qui reformule parfois des concepts très anciens, est apparue ans les années 1960-70. Elle propose des outils pour se demander quelle fonction assument les détails du texte, quelle information ils donnent au lecteur. Cette méthode s’est d’abord appliquée aux textes littéraires romanesques. Son application aux récits bibliques n’intervient que dix ans plus tard, quand la recherche historique commence à s’essouffler et à perdre de sa crédibilité.
Cette lecture renouvelée des textes bibliques fournit à l’exégète un mode d’exploration supplémentaire qui s’ajoute à l’analyse historico-critique et à l’analyse structurale. Rappelons que la visée de la critique historique est de s’intéresser à l’événement historique que rapporte le texte et aux conditions dans lesquelles ce dernier a été écrit, et à la personnalité et à la vie de celui qui écrit. L’analyse structurale, elle, s’intéresse au texte uniquement et au fonctionnement du langage dans le texte.
L’analyse narrative propose pour sa part un déplacement du regard pour chercher à comprendre comment l’auteur communique son message au lecteur ; comment il programme le déchiffrement du sens du texte parle lecteur, comment il le guide dans cette opération.
§Lecteur impliqué « Avec l’analyse narrative, nous cherchons à savoir comment le message du narrateur se tricote avec la vie même du lecteur, comment l’exégète a permis à ses lecteurs de se sentir concerné par le récit », résume Daniel Marguerat, professeur à la Faculté de théologie de Lausanne, spécialiste du Nouveau Testament. Prenons un exemple: la parabole du bon Samaritain est racontée d’un point de vue particulier, celui du blessé au bord du chemin. Le blessé reste anonyme, sans doute pour qu’on puisse mieux s’identifier à lui. Le récit tait ce que le blessé ne sait pas. Autre exemple cité par Daniel Marguerat, pris dans le l’Evangile de Luc (24) : « Le narrateur nous dit au départ que Jésus rejoint les deux disciples qui vont à Emmaüs, ceux-ci ne le reconnaissent pas. L’enjeu du récit est de se demander comment et à quel signe ils vont le reconnaître. Ce signe-là, le pain rompu par le Christ, prend alors une importance capitale. » Grâce à cette nouvelle manière d’explorer les Ecritures, les chercheurs deviennent attentifs à des éléments en général banalisés et négligés par d’autres lectures.
§Des silences éloquentsLes silences et les blancs du récit ont aussi une fonction et un sens aux yeux du conteur.« C’est par ce que le narrateur ne dit pas qu’il suscite l’imaginaire du lecteur » ajoute Daniel Marguerat.
L’analyse narrative s’intéresse par exemple à découvrir comment, sans que soit retouchée notablement l’histoire racontée, trois évangélistes Marc, Matthieu et Jean, parviennent à composer chacun un récit spécifique, simplement par le jeu différencié de leur rhétorique narrative. « On perçoit, écrivent Daniel Marguerat et Yvan Bourquin dans leur manuel d’initiation à l’analyse narrative, « Les récits bibliques », que leur stratégie narrative est au service d’une théologie ; elle pointe chez Marc sur l’isolement progressif de Jésus, chez Matthieu sur la relation paradigmatique maître-disciples, tandis que Jean s’attache à mettre en scène l’Enigme de l’Envoyé de Dieu. »
Cette approche nouvelle est en plein développement. Les participants au Colloque international qui va avoir lieu début mars à l’Université de Lausanne confronteront leurs résultats au travers de septante exposés et présenteront des aspects de leur travail lors de quatre conférences publiques.