Pierre de Salis: Redonner ce que l'on a reçu
Faubourg de l’Hôpital 24 à Neuchâtel. Le bâtiment qui abrite le siège de l’Eglise réformée neuchâteloise (EREN) accueille également depuis plusieurs années l’Office protestant de la formation (OPF), un passage obligé pour les futurs pasteurs et diacres de toute la Suisse romande. Et cela fait plus de sept ans que Pierre de Salis accompagne la relève des Eglises francophones de Suisse, un rôle qu’il considère comme très important.
Disponible et ouvert au dialogue, il partage volontiers son expérience avec la nouvelle génération de ministres, oscillant entre le formateur et le théologien soucieux de repositionner les ministères dans une société en proie à de profonds bouleversements.
Industriel dans l’âme
Rien ne prédestinait Pierre de Salis à devenir pasteur. «Dans la famille, on était juriste, ingénieur ou diplomate», préciset- il. Son père, docteur en droit industriel, était toutefois un féru d’histoire. C’est peut-être cette dimension qui a poussé le jeune homme à voir au-delà d’une voie toute tracée.
En revisitant sa généalogie, il découvre des ramifications huguenotes, ces protestants français contraints de fuir leur pays à la suite de la révocation de l’Edit de Nantes: «J’ai éprouvé une certaine fierté d’être lié à cette histoire, j’ai même trouvé des liens familiaux avec Ernest Francillon, le créateur des montres Longines.»
Entre ferveur et contemplation
Durant sa jeunesse, Pierre de Salis fréquente un groupe d’Eglise sur Neuchâtel qu’il qualifie d’assez militant. «De nombreuses vocations de pasteurs sont nées grâce au groupe «amitié», ajoute-t-il. Il effectuera ses années de lycée au Collège catholique de Saint-Maurice en Valais. Sur place, il est séduit par une spiritualité plus contemplative. «Je me souviens de moments mémorables, comme la célébration d’une eucharistie sur un glacier que nous avions atteint en peau de phoque.»
Ces expériences de jeunesse lui feront prendre conscience qu’il existe de nombreuses formes de spiritualité et que les unes et les autres se complètent. Elles l’inciteront à se lancer dans des études de théologie à Lausanne et Neuchâtel. Il y rencontrera celle qui deviendra sa femme. Sitôt après le mariage, le couple effectuera encore une année de recherche à Buenos Aires pour se former à la théologie de la libération, puis voyager à travers l’Amérique latine.
Pasteur polyvalent
De retour en Suisse, il devient pasteur de l’EREN et occupe un ministère à la paroisse de l’Ermitage, en ville de Neuchâtel, durant sept ans. «J’étais ce que l’on appelle un pasteur ‘ généraliste ’. Je m’occupais des jeunes et des aînés, et des familles. J’organisais des grillades après les cultes pour développer la convivialité dans la paroisse et réunir les générations», se remémore-t-il en souriant.
Son destin le conduira ensuite à devenir directeur du Centre de rencontre et de formation du Louverain (NE), puis chargé de formation pour l’EREN. Après l’obtention d’un brevet fédéral de formateur d’adulte, il poursuivra sa lancée et rejoindra les rangs des formateurs de l’OPF. Bien que très sollicité par ces différentes activités, il se lance dans un projet de thèse de doctorat. Dans ce travail de plus de 400 pages, il s’intéresse en profondeur aux lettres de Paul et à leur réception, tout en ouvrant sur la communication moderne. Afin que le plus grand nombre puisse profiter de ses réflexions, il a condensé son travail dans un ouvrage qui se veut tout public. «C’était pour moi un moyen de redonner ce que la théologie m’a apporté», ajoute-t-il.
Nouveau défi
Depuis le début de cette année, Pierre de Salis est le nouveau président de l’Assemblée de la Fédération des Eglises protestantes de Suisse (FEPS) qui deviendra, dès 2020, l’Eglise évangélique réformée de Suisse (EERS). Le pasteur aura un rôle important dans cette transition historique: «L’EERS offrira les grandes orientations destinées à façonner l’avenir de l’Eglise dans un monde où tout change très vite.» Sa fonction consistera à gérer des débats chargés émotionnellement et des prises de décision qui risqueront, selon ses dires, d’être parfois bien complexes.
Bio express
1962 Naissance à Vevey.
1982 Maturité au collège de Saint-Maurice (VS).
1987 Licence de théologie de l’Université de Lausanne.
1988–1989 Etudes de théologie en Argentine.
1990–1997 Pasteur à Neuchâtel.
1997– 2003 Directeur du Centre du Louverain (NE).
2003 – 2011 Chargé de formation pour l’EREN.
2007–2010 Membre du Conseil synodal de l’EREN.
2009 Brevet fédéral de formateur d’adultes.
2012– 2019 Chargé de formation à l’OPF.
2017 Doctorat en religions, histoire et systèmes de pensées et en théologie.
2019 Président de l’Assemblée de la FEPS.
Livre
Pierre de Salis vient de publier un ouvrage qui résume sa thèse de doctorat. Destiné à un large public, il porte sur la lettre comme moyen de communication.
Les Corinthiens – Des Lettres pour nos crises,
Pierre de Salis, Editions Cabédita, 2018.