Eva Di Fortunato, nouvelle présidente de l’Eglise
Adolescente, elle corrigeait les prédications de son père, nommé pasteur au Tessin parce qu’il était issu de l’immigration italienne aux Etats-Unis, mais qui ne parlait pas parfaitement la langue. «Je devais également l’aider pour la prononciation de ses prédications, que j’entendais une nouvelle fois lors du culte du dimanche. Au bout d’un moment, j’ai ressenti une saturation.»
Elle s’éloignera de l’Eglise, qu’elle ne fréquentera alors plus qu’en famille lors des grandes fêtes liturgiques. Puis de son canton d’adoption, puisqu’elle est née à Zurich, pour étudier la sociologie à Genève. Son futur mari n’étant pas croyant, elle renoncera même à un mariage religieux. C’est peu après la naissance du premier de ses trois fils, Gabriel, «un vrai ange annonciateur», qu’elle renouera avec la foi. Le déclic a été la réponse de sa maman lorsqu’elle lui a dit qu’elle n’y arrivait pas avec ce «bébé tellement difficile»: «Rentre dans la première église que tu vois.»
Eva Di Fortunato suit son conseil et franchit, en ce dimanche de février 2005, les portes d’un lieu de culte évangélique. Elle y trouve un sens de la communauté et le soutien dont elle avait besoin. «Retrouver ma foi m’a permis de tenir le coup, d’aller de l’avant.» Au fil du temps, elle prend conscience que la théologie de cette communauté ne correspond pas à sa conception de la foi. Ses pas la mènent alors au temple de Versoix, commune dans laquelle elle a emménagé. Le baptême d’une personne handicapée, célébré lors du premier culte auquel elle assiste, par la pasteure Laurence Mottier, la convainc: «J’ai alors décidé que cette paroisse était adaptée pour être ma ‹famille›».
A peine quelques semaines plus tard, la Genevoise d’adoption deviendra animatrice de l’Ecole du dimanche – elle l’est encore – puis catéchète pour l’Eveil à la foi et le caté primaire. Les nombreuses activités proposées aux enfants et aux familles par la paroisse ont fait mouche: le week-end organisé mi-juin pour les 8-12 ans a réuni 17 enfants et lors des grandes fêtes, ils sont encore bien plus nombreux. «Parfois, les enfants représentent la moitié de l’assemblée! Je suis ravie de voir où nous en sommes aujourd’hui et je vais continuer à m’engager pour cela», précise Eva Di Fortunato.
En 2013, elle rejoint le Conseil de paroisse de Versoix et en prendra la présidence il y a cinq ans. Elle avait hésité à s’y engager, elle ne l’a jamais regretté, bien au contraire. Elle y a trouvé une équipe dynamique et chaleureuse, qui l’a, de plus, énormément soutenue lors de son divorce: «Le Conseil de paroisse, les paroissiens et le pasteur ont été incroyables. Ils ont été ma bouée de sauvetage, comme une communauté au sens premier, pour me permettre de passer cette année très compliquée.»
L’été dernier, lorsqu’elle a été approchée pour rejoindre le Conseil du Consistoire (exécutif) de l’Eglise protestante, sa première réponse a été «hors de question». «Ces dernières années, j’ai beaucoup critiqué la gestion de l’Eglise, alors c’était évident pour moi de dire non. Et puis j’ai réfléchi. Je me suis dit que c’était peut-être mon tour de mettre la main à la pâte.» Sa présidence, elle la veut collégiale. «Mon rôle sera surtout de représenter notre Eglise. Je suis certaine que l’on pourra aller loin, notamment avec ce Conseil du Consistoire très motivé, plein d’idées et d’enthousiasme. Nous sommes là car nous avons un message à transmettre, nous et tous les lieux d’Eglise.»