Le travail, source de souffrances
«On parle beaucoup de décrochage scolaire. Il y a des élèves qui restent sur le bord du chemin, en partie par ce qu’ils sont, en partie par ce qu’est l’école. Je rencontre des adultes qui sont dans la même situation face au monde du travail. Des personnes qui sont bien formées, mais qui ne parviennent pourtant pas à s’insérer dans la vie professionnelle», relate le pasteur Nicolas Besson, qui a rejoint il y a quelques mois la pastorale oecuménique Monde du travail du canton de Vaud. Il complète: «Il y a des gens qui sont en décrochage parce qu’ils ne parviennent pas à se reconnaître dans le monde professionnel; ils peinent à y consacrer leur vie parce que cet univers ne leur correspond pas ou plus. A cet égard, je constate que la situation climatique, une économie de marché exacerbée, les scandales industriels ou la guerre aux portes de l’Europe ajoutent à leur difficulté de s’investir.»
Mais l’absence d’emploi peut également être une véritable souffrance, souligne la diacre Magali Borgeaud-dit-Avocat, qui vient en aide aux personnes précaires dans l’Ouest vaudois. «Je viens par exemple en aide à un père qui se morfond: ‹Mais quel exemple je donne à mes enfants?› J’essaie de l’amener à prendre conscience qu’il peut apporter sa présence, qu’il a d’autres richesses. Je l’aide à changer son regard sur lui-même», explique la ministre.
Emplois risqués
«Les emplois précaires représentent un risque, la crise du Covid l’a bien montré», constate Magali Borgeaud-dit-Avocat. «J’ai accompagné une personne qui s’est mise à son compte peu avant la pandémie. Comme indépendant, il n’avait pas droit au chômage, mais comme son entreprise manquait d’ancienneté, il n’avait pas droit aux RHT», témoigne-t-elle, avant d’évoquer un autre cas où une personne souhaitant se débrouiller a accepté des postes mal rémunérés, ce qui a eu pour conséquence la perte de prestations sociales loin d’être compensée par le maigre revenu obtenu.
Ce que l’Eglise peut apporter dans ce genre de cas? Du temps, de l’écoute sans jugement et parfois un espace de sécurité: «Les personnes qui bénéficient d’aides sont souvent amenées à remplir beaucoup de documents, à justifier de leurs dépenses, de leurs actes. Et chaque erreur peut conduire à des sanctions», regrette la diacre. Et parfois un tout petit supplément d’humanité. «Je me déplace chez les gens, c’est important, même quand ce chez-soi est un banc. J’ai découvert que donner aux personnes vulnérables la possibilité de m’offrir un café ou un simple verre d’eau, cela leur redonne un peu de dignité. Pouvoir me montrer leur lieu de vie, me dévoiler une partie de leur richesse, c’est revalorisant.»