Le jeûne, c’est toute l’année
Ces mauvaises raisons? S’imposer des pratiques pénitentielles, comme la privation de nourriture, pour mériter le salut. De fait, le temps du carême – ces quarante jours qui précèdent Pâques et que le catholicisme marque traditionnellement par diverses abstinences alimentaires – ne connaît pas la prescription du jeûne en protestantisme. Ainsi, les carnavals ont systématiquement lieu durant carême en terres réformées, et non juste avant, en s’affranchissant dès lors des interdits catholiques: pensons à Bâle ou aux brandons en pays vaudois. Et à Zurich, la Réforme protestante est née avec «l’affaire des saucisses», au XVIe siècle, quand Zwingli a soutenu ceux qui mangeaient de la viande en plein carême.
Un sens communautaire
Pourtant, note le théologien Olivier Bauer, le jeûne n’est pas absent chez les protestants: mais, «fédéral» ou «genevois», il n’a de sens que communautaire et couplé à une pratique de réflexion ou de solidarité. Plus récemment, il peut exprimer des préoccupations environnementales ou climatiques.
Il n’en reste pas moins que cette pratique relève de la responsabilité individuelle en protestantisme. Et le professeur lausannois de commenter: «S’il n’y a pas de jeûne en carême dans notre tradition, celle-ci se distingue de manière générale par la retenue et la tempérance.»
La sobriété et la modération pousseraient-elles les protestants à faire carême toute l’année? Ce n’est pas sans avantage: une statistique canadienne a montré qu’en évitant les montagnes russes en termes nutritionnels, ces derniers ont une meilleure hygiène de vie que les catholiques! C’est que, disait Luther, «toute ma vie est pénitence».