Il y a bien longtemps, à l’époque des légendes, Ezaradan, la déesse de l’agriculture, se préparait pour les récoltes du premier Eté du monde.

Elle aiguisa sa faucille, prépara de nombreux paniers, enfila une longue cape aux reflets dorés et se mit en route: un long et fatigant travail l’attendait.

Lukédès, le dieu du soleil, la vit se mettre en chemin, l’observa dans les champs et décida de l’aider en faisant mûrir et sécher de beaux et lourds épis de blé.

Jour après jour, et pendant plusieurs mois, Ezaradan récolta les céréales sans s’arrêter, malgré la fatigue. L’Hiver n’allait pas tarder à arriver. Lukédès apporta si bien son aide que les grains mûrissaient en trop grand nombre, la tâche devenait trop importante pour Ezaradan. Malgré ses pouvoirs de déesse, elle ne pourrait sans doute pas terminer les récoltes avant l’arrivée des premiers froids de l’Hiver.

Elle se rendit alors sur l’une des plus hautes montagnes du monde, là où le ciel rencontre la terre. Elle y appela Aïon, le roi des dieux, pour qu’il lui donne davantage de temps. Mais il refusa.

Ezaradan mit donc le cap vers le nord des terres pour aller frapper à la porte du palais de l’Hiver. Elle le supplia de repousser sa venue, mais celui-ci refusa également. Il ne voulait pas bouleverser le cours du temps et des saisons.

N'ayant obtenu aucun délai supplémentaire, Ezaradan retourna tristement à son travail dans les champs.

Désespérée de voir ceux-ci bientôt givrés, d’imaginer les récoltes perdues, la déesse eut alors une idée.

Elle arracha des fils dorés de sa cape. Elle les tressa avec de la paille, des feuilles et des brins d’herbe et fabriqua ainsi de nombreux petits pantins verts auxquels elle donna la vie.

Ces petites créatures végétales s’animèrent puis se mirent au travail et aidèrent la déesse a terminer les moissons avant l’arrivée des sombres nuages de l’Hiver.

C’est ainsi que l’on raconte la naissance des valeureux lutins des bois et des champs: les Neï Ktônia, les «fils de la terre» ou «les petits moissonneurs de l’Eté».