Genève: un essor grâce aux réfugiés
Durant le XVIe et le XVIIe siècle, de nombreux protestants français, communément appelés Huguenots, arrivent en ville de Genève. Ils fuient les persécutions dont ils sont victimes dans leur pays. Une vague massive arrivera suite à la Révocation de l’édit de Nantes en 1685. «La ville de Genève ne serait certainement pas ce qu’elle est aujourd’hui sans l’apport des réfugiés Huguenots», souligne Marc Bridel, secrétaire de l’Association suisse pour l’histoire du Refuge Huguenot. «Les nouveaux arrivants ont apporté leurs compétences, notamment dans l’industrie textile, et ont contribué au développement de la cité» ajoute-t-il.
Grâce à la Réforme, la ville offre un terrain propice aux affaires. En cautionnant le prêt à intérêt, le Réformateur Jean Calvin a relancé l’économie de la ville alors en pleine récession. «Il était alors urgent de trouver de nouveaux moyens d’accroître l’activité économique», explique François Dermange, spécialiste d'éthique économique à l’Université de Genève: «La pratique de l’intérêt a permis un fort développement de celle-ci. Et indirectement, elle a aussi permis, plus tard, de favoriser l’activité financière». Ce développement n’aurait certainement pas réjouit Calvin, lui qui s’est opposé à la création d’une banque à Genève. Pour le Réformateur, il n’était pas question de faire du commerce d’argent un métier.
Une nouvelle politique en matière d'asile
Les réfugiés Huguenots sont accueillis par les autorités qui se voient contraintes de trouver une nouvelle manière de gérer cette migration massive. «Jusqu’alors, l’asile ne consistait pas en un droit tel qu’on peut le concevoir aujourd’hui», note Naïma Ghermani, Maître de conférence en histoire à l’Université de Grenoble. Pour la chercheuse, cette période de l’histoire marque la naissance du droit d’asile actuel: «Les autorités genevoises ont mis en place un contrôle très efficace en dressant des listes des personnes migrantes». Cette nouvelle politique a permis la prise en charge de plusieurs milliers de réfugiés qui ont ensuite été redirigés vers d’autres cantons réformés, vers l’Allemagne ou encore les Pays-Bas.
De nombreux Huguenots choisissent toutefois de s’établir définitivement à Genève. «Les protestants français n’avaient pas de 'capitale' à proprement parler» explique Marc Bridel. «La ville de Genève leur a offert un point de ralliement. Elle est ainsi devenue un centre pour le protestantisme francophone». En quelques années, la cité voit sa population doubler. Afin de loger ces nouveaux arrivants on surélève les maisons et on entreprend de nouvelles constructions.
Cet accueil favorable a contribué à façonner le mythe de l’ «esprit de Genève». Une notion qui sera ensuite enrichie par Rousseau et les Lumières, la création de la Croix-Rouge et les Conventions de Genève. Dès lors, la ville devient une référence en matière de promotion de la paix et jouera un rôle primordial sur le plan diplomatique international.