Berne-Jura-Soleure: «La pénurie de pasteurs nous heurte de plein fouet»
Lors du Synode des Eglises de Berne, Jura et Soleure (Refbujo), qui s’est tenu au Rathaus de Berne du 21 au 22 novembre, la menace de pénurie de pasteurs s’est concrétisée. Une quinzaine de postes pastoraux sur environ 500 sont actuellement ouverts et ne trouvent pas preneurs, alors que des tensions se font sentir entre paroisses urbaines et rurales. Eclairage avec le pasteur de Tramelan Philippe Kneubühler, ancien président du Conseil du synode jurassien et actuel conseiller synodal de Refbejuso ainsi que membre de l’Exécutif de l’Eglise évangélique réformée de Suisse.
La pénurie de pasteurs est-elle devenue une réalité concrète?
Oui. Pour nos Eglises, l’effet de cette pénurie va d’ailleurs être massif, car les boomers partiront tous très bientôt à la retraite. Dans environ cinq ans, une trentaine de pasteurs quitteront leurs fonctions chaque année. Et on n’a évidemment pas une trentaine d’étudiants qui sortent chaque année de la formation en théologie. De plus, les besoins des paroisses ne sont pas uniquement pastoraux. Les pasteurs, dans notre conception actuelle, sont les seuls ministres qui font tout et surtout qui peuvent tout faire. Mais parce qu’ils viennent justement à manquer, il est peut-être temps d’envisager une ouverture, soit de répartir différemment le travail et créer ainsi de l’attractivité autour de la fonction de diacre ou d’animateur de paroisse.
Quid de la situation des diacres, justement?
Avec les diacres, nous avons le problème suivant: sur la partie alémanique, nous avons des collaborateurs socio-diaconaux qui sont comme des assistants sociaux d’Eglise, mais pas véritablement des ministres. Ils sont engagés par les paroisses et seule une minorité d’entre eux souhaite entre «envoyé en mission» par l’Eglise. Et sur la partie francophone de notre Eglise, à savoir l’arrondissement jurassien, nous avons très peu de postes de diacres ouverts. Alors dans le fond, former des gens pour ne pas avoir de place de travail à leur offrir, cela est évidemment très embêtant.
La pratique de la catéchèse semble également devenir de plus en plus difficile…
Oui. Nous avons là aussi des problèmes à recruter. Contrairement aux autres Eglises romandes, nous avons un ministère de catéchèse qui a mis en place sa propre formation. Celle-ci est longue et exigeante. Et après, les conditions d’embauche ne sont pas à la hauteur des attentes, car il s’agit de petits pourcentages. Pour pouvoir en vivre, il faut être engagé par plusieurs paroisses, et cela pose des questions d’agenda… On est en train d’y travailler.
La commission de gestion a dit que cela créait des conflits. A quel niveau?
Il existe de la tension entre les paroisses car une concurrence se met en place entre les milieux ruraux et urbains. En effet, les paroisses avec un poste de pasteur ouvert aimeraient attirer les personnes déjà peu nombreuses qui choisissent le pastorat chez elles. Mais les jeunes pasteurs, en général, préfèrent choisir un ministère en ville.
A quelles solutions vos trois Eglises songent-elles?
La pénurie qui s’annonce nous oblige à nouveau à ouvrir la discussion sur les ministères , soit ceux dont on a véritablement besoin. Nous pourrions par exemple diminuer le nombre de postes pastoraux et augmenter le nombre de postes de diacres et de catéchèses, et les payer grâce à la manne de l’Etat prévue pour les postes pastoraux. Ce sont des réflexions en cours. Nous avons lancé un programme pour les personnes désireuses de devenir ministres et qui ont déjà un master, qui dure trois ans au lieu de cinq (ITHAKA, en partenariat avec la Faculté de théologie de Berne, ndlr.). Et en attendant, nous continuons d’engager des pasteurs à la retraite pour combler les manques. Nous faisons donc malheureusement face à un défi que nous n’avons pas assez anticipé, et qui nous heurte actuellement de plein fouet.
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