Les chrétiens d’Israël sont divisés sur la question du service militaire
«Nous voulons que les chrétiens s’intègrent dans la société israélienne et les institutions de l’État», déclare le père Gabriel. Ils devraient «apporter leur contribution non seulement en paroles, mais aussi en actes», ajoute-t-il. Pour gagner autant de personnes que possible à cette cause, un «Forum pour le recrutement des jeunes chrétiens» s’est réuni dans la ville, il y a un peu plus d’un an, sous le patronage du père Gabriel.
Depuis lors, le nombre des conscrits chrétiens venant de Nazareth est passé de 35 à 130, rapporte l’ecclésiastique. À cela s’ajoutent 500 autres chrétiens qui se sont portés volontaires pour un service civil.
«Ce que dit le père n’est pas important», commente un jeune vendeur de souvenirs en secouant la tête. Juste à côté de la basilique de l’Annonciation, il vend des petites croix en bois, des cierges et des foulards multicolores. Si quelqu’un veut s’enrôler dans l’armée, il doit le faire volontairement, estime le jeune homme. Lui-même chrétien, il rejette le service obligatoire tel qu’il existe pour les Israéliens juifs.
De manière générale, l’opinion apparaît plutôt sceptique dans la ville. La plupart des gens ne veulent pas s’exprimer à ce sujet, de peur de jeter une ombre sur la coexistence entre musulmans et chrétiens.
La coexistence entre musulmans et chrétiens est fragileIl y a une dizaine d’années, Nazareth a vécu concrètement à quel point les esprits s’échauffent rapidement quand l’orgueil religieux est en jeu. Les musulmans fondamentalistes poussaient à la construction d’une immense mosquée devant la basilique de l’Annonciation.
A cette époque, les chrétiens et les musulmans se sont affrontés au cours de violentes manifestations. C’est le pape qui a finalement mis fin au projet, sur pression de Rome et Israël a fait détruire les fondations de la mosquée.
Le souvenir de la lutte à propos de la mosquée et la vision qu’ils ont de la situation au-delà des frontières incitent les chrétiens d’Israël à repenser leur solidarité. En Israël, souligne le père Gabriel, les chrétiens sont en sécurité.
Face aux terribles souffrances de leurs coreligionnaires dans les pays arabes et aux assassinats qui les frappent quotidiennement «seulement parce qu’ils sont chrétiens», toujours plus de jeunes membres de la communauté ont le sentiment qu’ils ont quelque chose à rendre à l’État «qui, de son côté, les protège».
Les chrétiens font partie du «groupe arabe»Jusqu’ici, il ne semblait pas y avoir de doute sur le fait que les chrétiens se considéraient comme une partie du groupe arabe. Avec les musulmans, ils appartenaient, lors de la fondation de l’État, à la communauté de la minorité non juive.
Le danger qui les menace dans leurs propres rangs incite maintenant certains d’entre eux à changer de camp. Le père Gabriel va même jusqu’à dire qu’il est «un chrétien israélien, non un Arabe». En été, le prêtre orthodoxe grec de Nazareth a été reçu par le Premier ministre Benjamin Netanyahu, qui l’a soutenu dans son projet.
De ce fait, ce n’est pas seulement auprès des musulmans qu’il se rend impopulaire. Sa propre communauté l’a menacé d’une interdiction de travail. L’archevêque Atallah Hannah, du Patriarcat orthodoxe grec de Jérusalem, considère les chrétiens en Israël comme «partie intégrante de la structure de la société arabe».
D’autres représentants de l’Église mettent aussi en garde contre un isolement de la minorité chrétienne au sein de la minorité non juive. C’est ce qui est arrivé aux Druzes, le seul groupe arabe en Israël qui soit déjà soumis à l’obligation militaire. (FNA-119)