L’UDF soutient l'idée d'une ambassade suisse à Jérusalem

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L’UDF soutient l'idée d'une ambassade suisse à Jérusalem

10 janvier 2018
Proche des milieux évangéliques, l’Union démocratique fédérale a lancé une pétition pour que la représentation suisse en Israël soit transférée de Tel-Aviv à Jérusalem. Cette demande a-t-elle des fondements religieux?

Au mois de décembre 2017, Donald Trump a annoncé sa volonté de déplacer à Jérusalem l’Ambassade américaine en Israël. La concrétisation rapide de cette requête du Congrès laissée en suspens depuis 1995 a provoqué un tollé international, mais a aussi satisfait grandement les évangéliques blancs américains qui font partie de la base électorale du président. En Suisse, une demande similaire existe. Elle émane, ici aussi, des milieux protestants évangéliques, puisqu’une pétition à ce sujet vient d’être lancée par l’Union démocratique fédérale (UDF).

Israël semble d’ailleurs prendre une place importante dans la politique du petit parti puisque c’est en raison du traitement critiques envers ce pays par les médias du service public, que l’UDF appelle à accepter l’initiative pour la suppression du financement des radios et télévisions «no Billag». David Gysel, rédacteur d’«Impulsion», le périodique du parti s’en explique: «L’UDF écrit dans son programme d’action 2015-2019: “De bonnes relations avec le peuple et le pays d’Israël, le porteur des promesses bibliques, sont bénies de Dieu. La Suisse doit soutenir activement les activités politiques, économiques, culturelles et scientifiques qui servent les intérêts de sécurité de l’État d’Israël et qui permettent à la population israélienne et arabe en Israël de vivre dans la liberté, dans la sécurité, dans la paix et dans la dignité... L’UDF s’engage pour le droit d’Israël et de sa population à exister à l’intérieur de ses frontières historiques et pour son droit à vivre dans la paix et dans la liberté.”»

«Porteur des promesses bibliques», est-ce à dire qu’Israël jouit d’un statut particulier? «La plupart des évangéliques lisent l’histoire d’Israël et le retour de Jérusalem comme la réalisation de prophéties bibliques. En faisant un télescopage de catégories, on présente l’actualité de l’État sioniste comme la continuité des prophéties de l’Apocalypse. Ce serait la preuve que Dieu intervient aujourd’hui encore dans l’histoire humaine», analyse Philippe Gonzalez, sociologue des religions à l’Université de Lausanne. Il précise toutefois: «Cette question marque toutefois une fracture entre ce que croient la base et les élites. Les théologiens évangéliques sont en tension avec cette lecture de l’histoire et essaient de maintenir une certaine distance.»

Un acte symbolique fort

Déplacer l’ambassade à Jérusalem est un acte fort susceptible de raviver des tensions. Un parti défendant des valeurs évangéliques ne devrait-il pas s’engager pour la promotion de la paix? «L’UDF considère que la préservation de la paix par des États de droit qui ne cèdent ni au terrorisme ni à la tyrannie. Cette préservation ne se fait pas en cédant simplement à des menaces de violence. La non-reconnaissance de Jérusalem comme la capitale d’Israël n’a pas apporté de solution aux tensions israélo-palestiniennes. La préservation et la promotion de la paix à Jérusalem se font aussi en protégeant ou promouvant la liberté et la démocratie pour Jérusalem. L’UDF promeut ces valeurs avec toutes leurs implications. L’UDF écrit donc dans son programme d’action 2015-2019: “L’UDF s’engage pour le respect de la Convention de la Croix-Rouge et des droits de l’homme par le gouvernement israélien, aussi dans ses rapports avec la population arabe de la bande de Gaza et de la Cisjordanie, malgré l’état de guerre”», rétorque David Gysel par écrit.

L’actualité au prisme de la fin des temps

«Le conflit israélo-palestinien est lu au prisme de la fin des temps. Il est perçu comme inévitable. Ce qui ne contribue pas à l’apaiser. Nombre de croyants s’attendent à ce que les nations se liguent contre Israël et que seul le retour du Christ mette fin à ce conflit», analyse quant à lui Philippe Gonzalez. «Israël devient ainsi le baromètre de l’histoire: on fait l’exégèse des textes bibliques qui parlent de Gog et Magog en fonction de qui sont les ennemis d’Israël. Par exemple l’Irak pendant la Guerre du Golf. Ce type d’exercice est assez récent: après la Révolution française, depuis la Grande-Bretagne on a commencé à chercher des parallèles entre les prophéties bibliques de la fin des temps et les campagnes napoléoniennes.»

Pas question pour autant de parler de la fin des temps pour le parti politique: «L’UDF ne se prononce ni dans son programme d’action ni dans le texte de la pétition sur des scénarios eschatologiques. La pétition de l’UDF en tant que parti politique est ancrée dans la logique historique que Jérusalem n’a jamais été la capitale d’un autre pays qu’Israël et en plus dans la logique d’appliquer quant à Israël ce qui se fait par rapport à tous les autres pays aussi», écrit David Gysel faisant référence au droit à l’autodétermination de sa capitale.

L’UDF séduisait environ 1,2% de la population suisse en 2015, selon l’Office fédéral de la statistique. «On peut estimer que le chiffre de 3% d’évangéliques en Suisse avancé par Jörg Stolz et Olivier Favre est crédible. Parmi eux, une large majorité lit de façon plus ou moins stricte l’actualité au Proche-Orient comme des réalisations de prophéties bibliques», estime Philippe Gonzalez.