Le virus a contaminé nos rituels de salutation
Etienne, ministre de l’Evangile par la volonté de Dieu et de son Église, à vous qui me lisez: grâce, paix et santé de la part de Dieu notre Père, à la suite du Fils, par l’action de l’Esprit.
J’écris ces lignes alors que le coronavirus a déjà presque intégralement contaminé les services médiatiques, les agendas ainsi que nos conversations, et je me suis permis de reprendre une salutation presque paulinienne pour souligner mon désarroi face à la manière de se saluer, sans serrer la main, durant cette période de crise sanitaire. Car comme le disait pendant mes études l’estimé, et parfois obscur, Pierre Gisel: «C’est pas très facile ces jours, mais c’est une bonne chose une crise parce que ça nous force à nous poser des questions.»
Le Covid-19 me questionne car il contamine même nos comportements, principalement autour de la question des rituels de salutations. En effet, en tant que ministre, il y a nombre de situations où je suis appelé à saluer des personnes, que ce soit aux cultes et autres cérémonies funèbres ou non, lors des rencontres d’aînés, et toutes autres formes de réunions où la salutation n’est pas une simple convention sociale, mais une forme de rituel qui est encore considérée comme un point de contact avec la sphère paroissiale, voire spirituelle.
J’en suis donc ramené à ma manière de saluer, et cette dernière, qu’elle soit bise ou poignée de main, est tout aussi conventionnelle que non recommandable en période de pandémie. Et cette convention m’interroge. Certes, elle marque à sa manière une forme de seuil entre la démarche individuelle de la personne qui se rend à un événement d’Eglise, et son entrée dans une forme de vie communautaire, mais cette pratique ne porte en elle aucune marque distinctive d’une autre forme de salutation qui la rendrait spécifiquement chrétienne.
Je me demande donc s’il n’y aurait pas à (re) trouver une manière de se saluer en Église plus proche du «shalom» ou du «salam aleikoum», et moins sécularisée que le «salut!». Une manière de saluer qui à la fois limiterait la contamination au coronavirus, et augmenterait la contagion de l’Évangile? Hélas, il n’y a plus assez de sable ou de terre sous nos pieds pour pouvoir nous saluer en traçant un poisson dans le sable comme ont pu le faire les premiers chrétiens, alors je me contente de regarder les gens dans les yeux, en posant ma main sur le coeur. C’est ma manière de dire tant mon désir de lien que de sincérité. Mais est-ce que j’annonce la grâce? Et vous?
Toi qui d’une Parole a créé le monde
et qui d’un geste a tracé l’histoire
d’un bout à l’autre de ton royaume.
Offre-moi de vivre par ta grâce
et de témoigner dans mes gestes et
mes mots de la contagion de ton Evangile
qui m’appelle à être un porteur saint.
Aide-moi à me savoir aimé
et me sentir vivant, et donne-moi
de permettre à mes proches de partager
ce projet, qui mène à la paix,
à la vie et à Toi.
Amen
L’actualité décryptée par un jeune théologien
Le bon prédicateur doit avoir la Bible dans une main et le journal dans l’autre, selon une formule attribuée au théologien Karl Barth. Chaque mois, la rédaction met au défi un ou une jeune ministre de décrypter l’actualité avec les outils de la théologie.
L’auteur de cette page
Etienne Guilloud est heureux pasteur en paroisse à la Dôle, sur la côte vaudoise. Il partage son temps avec son amoureuse, la poésie, et parfois, sans le savoir, avec la théologie, dit-il.