Des rituels déjà très adaptables
Bien que les rituels nécessitent un certain cadre, celui-ci peut fluctuer en fonction des besoins des personnes concernées. Cette faculté d’adaptation dénote une volonté d’écoute pour accompagner chacune et chacun dans les moments charnières de la vie, qu’ils soient joyeux ou plus tristes. «Aujourd’hui, la norme est de co-construire le rituel avec les personnes qui le demandent. Les pasteures et pasteurs peuvent adapter le rituel en fonction des situations», précise Didier Halter.
Repères salvateurs
Pour le directeur de l’Office protestant de la formation (OPF), il est toutefois important d’avoir certains repères afin de ne pas se perdre: «Dans la formation, notamment dans le domaine des services funèbres, nous parlons souvent d’un curseur qui peut être déplacé selon deux axes. Un équilibre est à trouver entre le rôle social et religieux, d’une part, et entre la dimension de soutien et l’annonce de l’Evangile, d’autre part. Cela laisse déjà une grande marge de manœuvre», résume-t-il. Dans le cadre de leurs formations, les futurs ministres sont initiés aux bases des différentes cérémonies: «Un rituel, cela ne s’invente pas. Inventer quelque chose de nouveau serait totalement contre-productif. Rien n’empêche, par la suite, de le transposer de manière créative. On ne peut innover que lorsque l’on connaît la manière classique», ajoute-t-il. Il note cependant que les rituels centrés sur la prédication de la parole ont atteint leur limite et ne répondent plus, sauf exceptions, aux attentes des personnes qui les sollicitent.
Gestes symboliques
Parmi les éléments fondamentaux qui méritent réflexion figure celui de trouver un geste qui accompagne le rituel: «Pour un service funèbre, il est important de poser un geste qui symbolise l’au revoir. Celui-ci est à définir avec les familles. On peut par exemple laisser des enfants déposer un dessin sur le cercueil ou, si l’on voulait encore dire quelque chose au défunt, déposer des lettres, qui seront brûlées par la suite, avec une bougie à proximité», précise Didier Halter. Ces gestes symboliques s’appliquent bien sûr également aux autres rituels tels que les baptêmes et les mariages. Pour exemple, alors pasteur en Valais, il lui est arrivé de baptiser un enfant avec l’eau provenant de la source proche du chalet de personnes qui avaient une grande importance pour la famille.
Afin de stimuler leur créativité, les futurs ministres bénéficient d’une formation avec un pasteur camerounais de l’Eglise presbytérienne: «C’est une manière de les ouvrir à d’autres façons de percevoir un geste rituel, qui est certes religieux, mais joue également un rôle social très important dans la culture africaine», ajoute-t-il.
Cas d’école
Aujourd’hui, des demandes inhabituelles sont parfois faites: «Cela peut aller de la bénédiction d’une maison que ses habitants pensent hantée à un mariage de personnes de confessions différentes, en passant par l’inauguration d’une nouvelle cave à vin ou encore un deuil impossible à surmonter», énumère Didier Halter. Afin de pouvoir répondre positivement à de telles demandes, le pasteur se base sur deux convictions théologiques, sans pour autant préjuger du résultat: le rite est un service que l’Eglise offre au nom de l’Evangile et la célébration est un langage dans lequel l’Evangile se donne à accueillir, indépendamment de sa forme. Dans la démarche, la rencontre personnelle ainsi que l’écoute des besoins et la construction commune sont des plus importantes. Le fait que la personne s’adresse à une ou un ministre, en lui reconnaissant l’autorité de célébrant, lui permet de proposer une lecture évangélique de la situation. «L’essentiel pour moi est de toujours afficher clairement qui nous sommes. Contrairement à d’autres célébrants laïques, qui proposent souvent une version édulcorée d’un rituel, nous pouvons proposer un regard particulier sur des situations, parfois difficiles, qui prend en considération la dimension tragique de la vie. Cela permet de répondre au mieux aux besoins des demandeurs et des personnes présentes», conclut-il.