«Comprendre que l’Eglise ne se résume pas au culte»
Comme des dizaines de foyers, ils ont répondu présent. Sandra Depezay, aumônière à l’Eglise réformée de Neuchâtel, et Florian Bille, pasteur à Gimel-Longirod, dans l’Eglise réformée vaudoise (EERV), ont coordonné différentes activités bénévoles pour l’accueil et l’accompagnement de personnes réfugiées venant d’Ukraine, ces douze derniers mois. Installer, régulariser, assurer des cours de français… Retour sur leur expérience.
Un savoir-faire reconnu
Accueillir une personne réfugiée, c’est bien plus qu’offrir un lit. Florian Bille énumère: «Déplacer les Ukrainiens en voiture, aider aux différentes procédures administratives pour l’obtention du permis S, inviter à souper, préparer un repas, faire un CV, amener des habits ou des jouets, s’occuper de l’ouverture d’un compte postal ou bancaire, aider à rechercher un travail, donner des cours de langue, aller faire les courses, des ateliers bricolage, de danse, inviter à la découverte des sociétés locales, passer juste dire bonjour de temps en temps…»
Dans son village et autour de sa paroisse, des réseaux ont rendu cela possible. Sandra Depezay a suivi la même dynamique dans son canton. «Quand il faut, on est capables d’agir vite et bien. Souvent, les projets mettent du temps à se mettre en place en Eglise. Là, c’est vrai, on a été efficaces», remarque-t-elle. Pourquoi les réseaux d’Eglise sont-ils si efficients? «Savoir travailler avec des bénévoles est un plus, clairement.» Mais peut-être aussi en raison d’une certaine culture de l’ouverture. «Pour ma part, j’étais prêt à accueillir. L’Ancien Testament demande de prendre soin des réfugiés! Mais, outre l’espace physique, il faut un espace mental et psychique pour s’investir», complète Florian Bille. Son engagement, chronophage, mais en lien avec sa fonction, a suscité quelques agacements chez des collègues. Des clarifications ont été nécessaires.
Des réseaux bénévoles renforcés
Localement, l’arrivée de réfugiés a redynamisé des communautés. A Longirod, «300 habitants et désormais 28 réfugiés, les relations sociales ont changé. Il y a plus de vie, les gens se parlent», estime Florian Bille. Surtout, des réseaux de solidarité ont été renforcés.
Face à l’afflux de requérant·es d’asile au Centre fédéral de Boudry, un après-midi de permanence supplémentaire a vu le jour à l’espace d’accueil. Cela a été rendu possible par l’augmentation des bénévoles prêts à s’investir. En fin de compte, l’ensemble des réfugiés du centre en profitera, et non seulement les Ukrainiens. De la même manière, Sandra Depezay a pu étoffer son «carnet d’adresses» de bénévoles, au fil des actions mises en place pour les réfugiés ukrainiens. «C’est important dans la solidarité, où l’enjeu est de ne pas s’essouffler. Pour tenir dans la durée, il faut des bénévoles nombreux, motivés, mais aussi formés!»
L’Eglise au milieu du village
«Jamais on ne m’a autant ouvert les portes en tant que pasteur», s’étonne Florian Bille. «Municipalité, école, réunions diverses… Les gens comprenaient ce qui se passait, voyaient notre implication, nous invitaient facilement», explique le pasteur. «Au niveau des partenaires, des associations et des organes de l’Etat, il y a eu une prise de conscience accrue du travail que fait l’Eglise dans la solidarité. Elle a été plus visible. Le grand public aussi a compris que le rôle de l’Eglise ne se résumait pas au culte», complète Sandra Depezay.