Là-haut sur la montagne, le chalet de Juste Olivier ouvre ses portes
«En fait, quand j’ai débarqué à Gryon, je n’avais aucune idée de qui étaient Caroline et Juste Olivier», confie Sylvain Corbaz, pasteur dans la paroisse des Avançons. «Comme pour beaucoup de monde, le nom d’Olivier m’évoquait simplement la chanson de la Mi-été. Au niveau de la paroisse, peu de gens ont eu l’occasion d’entrer dans leur maison. L’optique sera celle de la redécouverte.»
Situé dans l’alpage de Cergnement, au-dessus de Gryon, le chalet de Caroline et Juste Olivier attire peu l’attention. Propriété privée jusqu’à aujourd’hui, il sera dorénavant mis à disposition du public par l’association «Caroline et Juste Olivier à Cergnement sur Gryon», créée le 25 septembre dernier. Les principaux objectifs sont de revaloriser un patrimoine culturel, ainsi que d’y organiser différents ateliers littéraires, artistiques, écologiques, mais aussi spirituels.
Un leg empreint de spiritualité
Pour Michel Kocher, co-président de l’association, la maison de Juste et Caroline est «un lieu habité». «Il y a quelque chose de la foi des gens qui y ont vécu», affirme-t-il. «C’est un leg que l’histoire nous a laissé. On ne peut pas faire comme si ce leg n’existait pas.» En effet, Caroline et Juste Olivier étaient des croyants fervents. Leur foi se renforce pendant leur séjour à Paris, de 1846 à 1870. Lorsqu’ils reviennent en Suisse et s’installent à Cergnement, ils font de la petite maison un lieu de recueillement pour leur famille. Les murs sont ornés des vers de leurs propres plumes, des noms de personnes qui y sont passées, mais aussi de courtes prières.
Au nom de la paroisse des Avançons, engagée dans l’association, le pasteur Sylvain Corbaz désirerait valoriser la maison comme un lieu de recueillement pour aujourd’hui. L’idée serait d’organiser des retraites méditatives avec des groupes, des familles ou encore des jeunes qui cherchent à se déconnecter. «L’alpage de Cergnement sort des chemins battus», explique-t-il. «Éloigné de tout, il n’a pas la 3G. Quand on se pose sur la terrasse, on est dans un autre monde, qui invite à l’intériorité
Cette appel à l’intériorité est confirmé par Lucienne Olgiati, l’une des descendantes de Juste Olivier. «Le ressourcement est immédiat lorsqu’on entre dans un lieu comme celui-ci. Je fais directement le lien entre ce qui est au-dedans de moi et une réalité plus grande qui m’entoure», affirme-t-elle. Et la co-présidente de l’association, Dominique Olgiati-Des Gouttes, propriétaire jusqu’alors des lieux, renchérit: «Je rejoins tout à fait la remarque de ma fille. Lorsque je suis arrivée ici en 2015, le brouillard m’enveloppait. Cela n’avait pas d’importance, car j’étais recentrée vers plus haut, vers mon Dieu. J’ai donné ce lieu au Christ.»
Une perspective holistique pour la société d’aujourd’hui
Les personnages de Juste et Caroline Olivier sont porteurs d’une perspective holistique, une perspective que la société d’aujourd’hui revalorise petit à petit. Théologien de formation, Juste Olivier est également journaliste et auteur du premier livre d’histoire du canton de Vaud. Avec sa femme, il partage la passion de la littérature, la poésie et la science.
Ils sont tous deux attentifs à la nature et aux plantes qui les entourent. L’enjeu serait de faire revivre ces différents aspects aujourd’hui, dans la maison où les deux poètes ont vécu.
«Si des experts viennent faire un séminaire sur telle ou telle herbe ou tel ou tel champignon, il faudrait qu’ils soient aussi capables de rendre compte de l’élan intérieur qui les habite», explique Michel Kocher. «J’espère que quiconque viendra dans ce lieu ne restera pas cloîtré dans sa bulle, mais fera dialoguer entre elles ces différentes perspectives.» Outre la commune de Gryon et la paroisse des Avançons, différentes institutions se sont engagées dans ce projet, notamment Alpes Vivantes, Pro Natura et l’Université de Lausanne. Au cours de l’été, des lectures publiques ont déjà été organisées à l’Alpage, au cours desquelles ont résonné les voix de Ramuz et de Juste Olivier. Le pasteur Sylvain Corbaz, pour sa part, ne voit pas seulement dans ce chalet l’occasion d’organiser des retraites paroissiales, mais aussi des activités familiales, centrées sur des savoir-faire ancestraux et l’artisanat. La réouverture du chalet oublié promet donc un avenir aussi culturel que spirituel.