L’homme en noir: Le chanteur country américain Johnny Cash est mort il y a dix ans

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L’homme en noir: Le chanteur country américain Johnny Cash est mort il y a dix ans

12 septembre 2013
(epd - ProtstInter) À la fin, il chantait ses chansons à demi-aveugle, dans sa chaise roulante. Mais ni une sournoise maladie neuro-dégénérative ni une fracture du maxillaire n’auraient pu l’empêcher d’enregistrer son testament musical.

«Je ne veux plus rien de ce monde. Je veux seulement encore faire de la musique et travailler aussi bien que je peux», disait Cash après l’enterrement de sa femme June Carter en mai 2003. «C’est ce qu’elle voudrait, et je le veux aussi.»

«Man in Black», l’homme toujours habillé de noir sur scène, est mort il y a dix ans, le 12 septembre 2003, à Nashville, Tennessee. Il avait 71 ans.

Cela faisait déjà longtemps que ses maisons de disques précédentes l’avaient relégué au rang de star du country vieillissante. Pourtant, avec les morceaux qu’il venait de graver, il avait amorcé encore une fois un brillant retour.

Sur les conseils du producteur mythique Rick Rubin, il avait ajouté à ses musiques country et gospel des interprétations ébouriffantes de chansons actuelles de groupes rock tels que U2 («One»), Tom Petty («Won’t Back Down»), Nine Inch Nails («Hurt») ou Depeche Mode («Personal Jesus»). Beaucoup tiennent les titres de la série «American Recordings» pour les meilleurs qu’il ait enregistrés depuis ses premiers succès.

Ce n’était pas un grand guitariste, mais...

Cash fait partie des rares musiciens country admis aussi bien dans le temple de la renommée de la musique country («Country Music Hall of Fame», 1980) que dans celui du rock’n’roll (1992). «J’ai toujours été un fan de Johnny Cash», reconnaissait le guitariste des Stones Keith Richards. «Il est à des kilomètres au-dessus de nous tous», écrivait son collègue et ami Bob Dylan: «Johnny était et demeure l’étoile polaire, le point de repère sur lequel tu peux t’orienter.»

Cash enregistra ses premiers succès – «Folsom Prison Blues», «Get Rhythm» et «Walk The Line» – à partir du milieu des années 1950, dans le légendaire «Sun Studio» de Memphis dont le chef, Sam Phillips, avait déjà engagé le jeune Elvis Presley, Jerry Lee Lewis et Carl Perkins. C’est aussi avec cette bande débordante d’énergie et de créativité que Cash fit ses premières tournées. À partir de ce moment, Cash – qui, après son service militaire, avait essayé sans succès de gagner sa vie comme représentant en électroménager – put se consacrer entièrement à la musique.

Ce n’était pas un grand guitariste, mais un chanteur au rayonnement charismatique, estime Inga Fransson, du musée rock’n’pop de Gronau. Avec son jeu de guitare simple, il donnait à sa voix, reconnaissable entre toutes, l’espace dont elle avait besoin pour s’épanouir.

Enfance pendant la Grande Dépression

Mais la fascination qu’il exerçait venait aussi de ce qu’il savait de quoi il parlait dans ses chansons, ayant connu lui-même la faim et la pauvreté. John R. Cash était né le 26 février 1932 dans une famille de paysans.

Il grandit à l’époque de la Grande Dépression à Dyess, Arkansas, où lui et ses frères et sœurs durent très vite travailler dans les champs de coton de leur père, dont le maigre revenu ne suffisait souvent pas pour nourrir les neuf membres de la famille. Johnny ne se remit jamais de la mort de son frère préféré Jack, de deux ans plus âgé que lui, victime d’un accident de scie circulaire à l’âge de 14 ans.

Sa tenue de scène noire était un programme: «Pour moi, c’est une expression de ma révolte», expliquait Cash. Il portait du noir pour les pauvres et les opprimés, qui ont faim mais qui n’ont plus d’espoir, pour les prisonniers, qui ont depuis longtemps expié leurs crimes, racontait-il en 1971 dans sa chanson programmatique «Man in Black».

Dans plusieurs de ses chansons, il s’engagea aussi en faveur des droits des Indiens autochtones – une révolution dans le monde du country alors plutôt conservateur. Avec son faible pour les marginaux, il n’était que logique qu’il se produise aussi devant des détenus. Ses meilleurs albums live sont des enregistrements de concerts donnés dans les tristement célèbres prisons d’État de San Quentin et de Folsom.

La musique m’emportait loin de la crasse, du travail et du soleil brûlant.

Cash commença à s’intéresser à la musique grâce à sa mère, Carrie Rivers Cash, qui, quand elle travaillait dans les champs, chantait des cantiques que le petit garçon écoutait avec passion. «La musique m’emportait loin de la crasse, du travail et du soleil brûlant», se souvient-il dans son autobiographie.

Toute sa vie, Cash dut lutter contre son côté sombre, autodestructeur. Durant de longues années, il fut dépendant des médicaments et des stimulants. «Je suis profondément enraciné dans la foi, mais je reconnais aussi ouvertement que je suis le plus grand des pécheurs», avouait-il dans une interview accordée au magazine «Rolling Stone».

C’est grâce à l’aide de sa deuxième femme, June Carter, avec laquelle il fut marié plus de 35 ans, qu’il parvint à sortir de la dépendance dont il souffrait depuis si longtemps. «June est mon rocher au milieu des vagues déferlantes», écrivait-il à son propos. Il ne pouvait s’imaginer vivre sans sa femme, qui était aussi sa partenaire sur scène. Quand June mourut en mai 2003 après une opération du cœur, il ne lui survécut que quelques mois. (FNA-78)