Rien n'a changé, tout a changé
Bienvenue dans le monde d’après. Dans ce numéro, nous rendons compte de ce qui s’est vécu sur le plan spirituel et communautaire pendant cette pandémie, parce que c’était inédit. Nous évoquons aussi des pistes pour «la suite». Les appels à «ne pas reprendre la vie d’avant» se multiplient de toutes parts. Certains demandent plus d’agilité numérique, un monde plus humain, une limitation des émissions de carbone, plus de moyens pour la santé… Nous avons voulu, modestement, souligner ce qui nous paraissait faire sens, répondre à des attentes exprimées depuis longtemps, porter des valeurs qui nous tiennent à cœur: proximité, attention aux autres, simplicité… Mais évidemment, ce monde d’après, c’est d’abord le vide. La perte. Le deuil. Le vacillement. Certain·e·s ont perdu des êtres chers. Nous avons aussi, collectivement, perdu des repères.
Tout est pareil: les restaurants vont rouvrir, les familles vont se réunir, les sorties reprendront. Mais rien n’est pareil: des entreprises disparaîtront, nos sociétés ont vu des morts brutales. La crainte de tomber malade est installée.
Comment donner un sens à tout ça? Que faire de cet inconnu? Peut-être, avant tout, faire le deuil du monde d’avant. Nous avons basculé, sans nous en rendre compte, dans une nouvelle réalité. La mort arbitraire a repris une place centrale, planifier à long terme devient illusoire, tout ce qui nous est proche s’avère subitement précieux. Bien sûr, on a envie de se précipiter en terrasse, de faire des grillades, de revoir ses proches: allons-y! Mais cela ne pourra pas se faire «comme si de rien n’était». Écoutons la mue qui s’est produite en nous. Acceptons notre nouveau «moi», notre nouveau «nous» pour mieux habiter cet «après» incertain.