Education : comment parler de Dieu aux enfants ?
Jusqu’à l’âge de 16 ans, l’éducation religieuse est choisie par les parents (voir encadré ci-dessous). Chez les tout·e·s-petit·e·s, la question ne se pose pas: leur rapport au monde fonctionne sur le mode de la croyance. «Ils ont de la peine à différencier la réalité de la fiction», explique Christine Fawer Caputo, professeure à la Haute école pédagogique du canton de Vaud, spécialisée en didactique d’éthique et cultures religieuses.
«L’appareil critique se construit autour de 7 ans. C’est à ce moment-là que l’on peut différencier le savoir, basé sur ce qui est démontré, et la crédulité, basée sur l’adhésion à des propos venant d’une source que l’enfant juge fiable. La croyance au Père Noël est un bon exemple de crédulité. Mais, petit à petit, l’enfant comprend les impossibilités du récit et le remet en question, même s’il est amené par ses parents.»
La croyance religieuse, une conviction
Faudrait-il bannir la crédulité et ainsi éviter d’entretenir des légendes chez les enfants? «Non, car elle stimule l’imaginaire. Et cela permet une première expérience spirituelle: croire à quelque chose que l’on ne maîtrise pas!» La croyance religieuse se distingue de la crédulité parce qu’elle est basée sur une conviction et «un lien de confiance réciproque entre la personne croyante et la divinité», détaille Christine Fawer Caputo. C’est ce qui explique qu’elle peut se poursuivre après «l’âge de raison».
Gérer les irruptions de religiosité
Comment accueillir ces croyances à l’école sans contrevenir à ce qui est tout juste en train de se construire, tout en respectant la liberté des autres? L’enseignement du fait religieux, souvent conçu autour de fêtes et de rituels au primaire, est l’occasion d’apprendre et de reconnaître les traditions de chacun·e. C’est important pour qu’un·e enfant se sente intégré·e, à condition de ne pas l’enfermer ou de le ou la réduire à ses traditions religieuses.
Mais en classe, la religion peut aussi surgir à des moments inattendus. Pour Petra Bleisch, professeure en didactique à la Haute école pédagogique Fribourg, la seule règle pour gérer ces irruptions de religiosité est de «prendre les choses au cas par cas, en tenant compte le plus possible du contexte et des personnes concernées». Un propos «peut avoir différentes motivations». Parfois, la religion «n’est qu’un prétexte» pour exprimer autre chose, assure la professionnelle. Dans tous les cas, «l’enfant est en plein développement. Ce dont il a besoin, c’est d’être accompagné, pas jugé ».
Recadrer sans juger
Accompagner peut aussi signifier recadrer. «Un enfant de 4 ans terrorisait ses camarades en leur parlant du diable et de l’enfer. Il a fallu lui demander d’arrêter de le dire dans le cadre scolaire, pas d’y croire. A cet âge-là, l’enfant ne dispose pas d’alternative cognitive et adhère sans réserve à ce que lui dit la famille», explique Christine Fawer Caputo.
Pour autant, recadrer n’est pas juger, souligne Petra Bleisch, rappelant le cas hypermédiatisé des enfants qui avaient soudainement refusé de serrer la main de leur enseignante à Therwil (Bâle-Campagne) en 2016. «A un âge où les enfants sont en plein développement, où leurs convictions peuvent encore changer, tout ce dont ils ont besoin est recevoir de la bienveillance.».
Responsabilité parentale
En Suisse, les parents sont responsables de l’éducation religieuse de leurs enfants (art. 303 du Code civil). Selon la Constitution fédérale (art. 15), ils peuvent choisir l’éducation religieuse qu’ils souhaitent dispenser, ou sont libres de ne pas en donner. A partir de 16 ans, la où le jeune a le droit de choisir sa confession.