Une pasteure invite des inconnus à un enterrement
Priscilla Schwendimann, jeune pasteure à la Predigerkirche de Zurich, ne pouvait se résoudre à célébrer des funérailles sans aucun participant. De fait, elle a choisi de lancer une bouteille à la mer, soit un appel sur les réseaux sociaux pour inviter qui voudrait bien l’y retrouver. Une initiative qui a porté ses fruits et pourrait bien se renouveler le cas échéant. Interview.
Vous avez lancé une invitation sur les réseaux sociaux pour un enterrement. Pour quelles raisons?
J'ai reçu une commande pour des funérailles, ce qui m'a un peu énervé au début parce que le délai était un peu court. Mais j'ai découvert que personne n'allait venir à cet enterrement. Je trouvais terrible que cette personne fasse son dernier voyage toute seule. J'ai donc spontanément eu l'idée d'appeler les gens à venir.
Comment cet appel s'est-il déroulé?
Je ne m'attendais pas à ce que la réaction soit aussi forte. Je pensais que trois ou quatre personnes viendraient. Mais au final, il y avait une vingtaine de personnes, jeunes et moins jeunes. Je n'en connaissais pas au moins la moitié! Cette sympathie était incroyablement belle et émouvante. J'ai aussi versé quelques larmes. En outre, l'appel a suscité de nombreuses réactions. Les gens m'écrivaient pour m’assurer de leurs prières ou envoyaient des photos des bougies qu'ils avaient allumées.
Connaissiez-vous le défunt?
Non, et j'avais très peu d'informations. Je connaissais le nom, la date de naissance et la date de décès. Mais on m'a informée que personne ne viendrait à l'enterrement et que cette personne avait un passé difficile. Il y a eu de nombreuses fractures dans sa vie.
Comment organiser un service funéraire quand on a si peu d'informations?
J'ai honnêtement dit que je ne savais pas grand-chose non plus. Pour cela, j'ai choisi un verset qui rappelle qu’on ne voit bien qu’avec le cœur et non avec vos yeux. Notre présence en a été la preuve pour moi. Nous sommes venus ici parce que nous avons été touchés par cette histoire, cette personne qui a eu une vie tellement brisée qu'elle s'est perdue dans la grande ville.
Cet enterrement vous a-t-il émue plus que d’ordinaire?
Le point de départ était très différent. D'habitude, lors des funérailles, je dois généralement tout contrôler. Je dois apporter du soutien et du réconfort aux gens lorsqu'ils sont tristes. Mais cette fois, j'ai aussi eu le droit d'être dans l’émotion. Les gens se sont laissés toucher par elle, et cela m'a touchée à mon tour. Nous sommes devenus une communauté pour une personne que nous ne connaissions pas. Celle-ci nous a rappelé, une fois de plus, combien la vie est fragile et que chaque personne a sa dignité.
Le fait que des gens aient répondu présent à votre appel vous a-t-il soutenue?
Je ne dirais pas «soutenue»: cela m'a rendu heureuse. Je pense que toute personne a le droit d'être accompagnée dans son dernier voyage. Nous étions une communauté pour cette personne qui n'avait personne d'autre. C'était aussi un acte de charité. Nous avons pris le temps de nous souvenir de cette personne, même si nous ne la connaissions pas. Nous avons reconnu que cette personne vivait dans notre ville et qu'elle nous appartenait en tant qu'être humain. Ce faisant, nous avons montré que cette personne était également aimée de Dieu.
Est-il courant d'être seul à un enterrement en tant que pasteur?
Je suis pasteure depuis un an et demi et je n'ai jamais vécu cela. Cependant, je sais que cela arrive de temps à autre. Je déteste l'idée que quelqu'un doive y aller tout seul.
Alors, la prochaine fois, allez-vous réitérer cet appel sur les réseaux sociaux?
Oui, j'ai vraiment décidé de ne jamais faire d'enterrement seule. Je vais peut-être créer un groupe dont les membres seraient prêts à venir à de telles funérailles à l'avenir.